La Dysplasie coxo-fémorale ou Dysplasie de la hanche

On en parle beaucoup, à juste titre puisqu'elle affecte les chiens de moyenne, grande race comme les retrievers, et de race géante. Elle est essentiellement d'origine génétique , avec un rôle de l'environnement également. Le seul moyen d'éradiquer cette tare génétique est la détection de la dysplasie, par une radiographie des hanches, chez les reproducteurs. Le club de race encourage cette détection en conseillant aux éleveurs professionnels et aux particuliers faisant reproduire leur chien de n'utiliser des reproducteurs quotés A, B ou C pour la dysplasie coxo-fémorale. Par ailleurs, les reproducteurs quotés C devront être accouplés uniquement avec des lices ou étalons quotés A.

 

Qu'est-ce qu'une dysplasie ??

Une dysplasie est un trouble du développement d'un segment anatomique, d'un organe ou d'un tissu.

La dysplasie coxo-fémorale est donc un trouble du développement de la hanche engendrant une instabilité, une laxité de cette articulation, ce qui fait que les surfaces articulaires (acétabulum au niveau du bassin, et tête fémorale) ne vont pas être en contact étroit.

 

L'origine de la dysplasie

- Facteurs génétiques !!! Ils sont nombreux (plusieurs gênes en cause) et c'est la cause principale. L'héritabilité de la dysplasie coxo-fémorale (HD pour Hip Dysplasia) est de 0,3 à 0,4, ce qui signifie que les facteurs génétiques interviennent dans une proportion de 30% à 40% par rapport à tous les facteurs. L'origine génétique de la dysplasie est donc fondamentale !!!!

- L'alimentation et la vitesse de croissance : la suralimentation et les excès d'énergie alimentaire favorisent une croissance rapide d'où une sollicitation plus importante de l'articulation et une dysplasie qui se trouve ainsi aggravée.

- Des désordres minéraux : notamment des désordres phospho-calciques comme une carence ou un excès de calcium. Avis aux adeptes de la supplémentation en calcium alors que l'alimentation du chiot, à base de croquettes de bonne qualité et parfaitement dosées et équilibrées !!! Vous n'aidez pas votre chiot ainsi, bien au contraire !

- Un exercice trop important pendant la première année du chiot : les longues promenades (plus de 20-30 minutes chez le chiot de moins de 6 mois, ou de plus d'une heure-une heure trente chez le chien de moins de 10-12 mois) sont à éviter car elles font beaucoup travailler des articulations déjà fortement sollicitées par la croissance. De la même façon, il est déconseillé de faire monter ou descendre des escaliers jusqu'à l'âge de 5-6 mois....quelques marches ne seront pas néfastes mais, dans la mesure du possible, il convient de porter le chiot dans les escaliers le plus tard possible.

En conclusion, l'alimentation et l'environnement ne font que favoriser une dysplasie, mais il y a TOUJOURS un terrain génétique prédisposant !!! Un chien "génétiquement" non dysplasique ne sera jamais dysplasique même s'il est obèse, s'il a fait de trop longues promenades étant jeune ou a monté des escaliers...

 

La pathogénie de la dysplasie de la hanche

Lors de dysplasie de la hanche, le ligament qui relie la tête du fémur à l'acétabulum (le bassin) est trop laxe, trop lache...Par conséquent, la tête du fémur est trop mobile et bouge à l'intérieur de l'articulation, voire se luxe (la tête sort de sa loge) ou se subluxe (presque luxée), alors que l'articulation d'un chien non dysplasique est maintenue bien fixe, le ligament plaquant la tête fémorale au fond de l'acétabulum !!! vous suivez ?

L'instabilité de l'articulation conduit à la déformation des pièces articulaires par les frottements répétés de la tête fémorale sur les bords de l'acétabulum.

Au début, le ligament va s'oedématier puis se déchirer ce qui agrave encore l'instabilité et favorise la luxation coxo-fémorale. Etant donné que cette maladie affecte le chiot, l'ossification n'est pas terminée, donc les cartilages sont lésés, car il y a des zones soumises à des pressions très fortes. Ainsi les pièces articulaires vont se déformer : la tête devient triangulaire au lieu de ronde, les cotyles (les bords de l'acétabulum) sont déformés par les frottements. Très rapidement, de l'arthrose se développe.

 

Les symptômes de dysplasie

Elle n'est pas forcément en adéquation avec le stade de dysplasie. Il y a souvent une énorme discordance entre les signes radiographiques (présence d'arthrose, stade E de dysplasie...) et les signes cliniques (les symptômes comme une boiterie ou une luxation de la hanche).

Généralement, il n'y a pas de boiterie avant l'âge de 6 mois, sauf dysplasie gravissime !!! Chez les jeunes chiots, on observe plus souvent des problèmes de déplacement, comme de rechigner à monter en voiture ou de se mettre debout sur ses membres postérieurs. On observe également des anomalies de la démarche telles que les pieds en rotation externe et les jarrets très serrés, ou des "sauts de lapin" lors de courses.

Au-delà de 6 mois, la boiterie est le symptôme principal.

Avec le temps, la clinique évolue vers l'installation d'arthrose de la hanche. On note également une douleur à la manipulation des hanches (chez le véto).

 

Le diagnostic de la dysplasie de la hanche par le vétérinaire

- l'examen clinique et orthopédique (manipulation des membres et des articulations)

- Mise en évidence du signe d'Ortolani : il s'agit, par des manipulations, de provoquer la sortie de la tête du fémur de sa cavité articulaire (l'acétabulum) lorsque la laxité ligamentaire le permet, c'est-à-dire lorsque l'animal est dysplasique.

1ère étape puis on pousse pour luxer la tête du fémur

 

Ensuite, en portant la hanche en abduction, la tête fémorale luxée reprend sa place dans l'acétabulum et le vétérinaire entend et ressent un "clac". Lorsque ce clac est présent, c'est un signe de laxité ligamentaire, puisque cela signifie que le ligament a été suffisamment lache pour autoriser la luxation de la hanche.

  puis on porte le membre en adbuction         et la tête rentre dans sa loge avec un "clac"

 

- Radiographies des hanches . Ces radios ne peuvent se faire avant l'âge de 4 mois car l'ossification est trop incomplète. Dans le cadre du dépistage systématique des reproducteurs, les radios sont effectués à partir de l'âge d'un an. Les radios permettent de dépister environ 80% des cas de dysplasie. Aux Etas-Unis, ce dépistage se fait à l'âge de deux ans et permet le dépistage de 95% des cas de dysplasies. C'est pourquoi, étant donné que les chiens ne reproduisent jamais avant l'âge de 15 mois chez les retrievers, ce qui correspond à l'âge de la confirmation, il serait souhaitable de dépister la dysplasie de la hanche à 15 mois minimum, voire plus tard afin d'éviter d'avoir de faux négatifs (= des chiens dysplasiques mais radiographiés comme non dysplasiques).

Le cliché se réalise dans des conditions précises, avec une position précise. Le chien est placé sur le dos, les membres postérieurs en extension, les rotules au zénith, en veillant au parallélisme des fémurs et à la symétrie du bassin. Le Retriever Club de France n'impose pas l'anesthésie générale pour prendre la radio, cependant une majorité de vétérinaire la préconise pour plusieurs raisons.

- Sans anesthésie, le tonus musculaire peut masquer une laxité ligamentaire, d'autant plus que la position pour la radio met la capsule articulaire sous tension, et favorise donc les faux négatifs.

- La position est très inconfortable voire douloureuse pour le chien car non physiologique.

  

 

Sur ce cliché, le vétérinaire mesurera les angles de Norberg-Olson et recherchera des signes de déformation des pièces articulaires ainsi que des signes d'arthrose. Suite à ces mesures et observation, une cotation de chaque hanche sera attribuée, cotation allant de la lettre A (hanche parfaite) à la lettre E (dysplasie sévère). C'est un vétérinaire lecteur officiel du Retriever Club de France qui attribue la cotation des hanches du chien radiographié, mais ce n'est pas le même vétérinaire qui aura pris le cliché radiographique. La radio est envoyé au siège du RCF qui la transmet au lecteur officiel. A noter que c'est la note de la plus mauvaise des deux hanches qui donne la note du chien. Ainsi, un chien ayant une hanche droite quotée A et une hanche gauche quotée C, sera officiellement quoté C !!!!

  cliquez sur l'image pour la voir plus grande

Traduction de la cotation des hanches

- Notation A : animal indemne de dysplasie. Aucune dysplasie actuellement visible. On a une coaptation parfaite et pas d'arthrose. L'angle de NO est supérieur à 105 degrés.

- Notation B  : suspicion de dysplasie . Stade intermédiaire ou état sensiblement normal. Il y a 2 possibilités: soit la congruence est moyenne mais l'angle est supérieur à 105°, soit la congruence est bonne mais l'angle est inférieur à 105°. Les hanches ne sont pas parfaites mais pas vraiment dysplasiques.

- Notation C  : dysplasie légère ou stade 1. Dans ce cas, la congruence est insuffisante et l'angle est inférieur à 105°

- Notation D  : dysplasie moyenne ou stade 2. Dans ce cas, la congruence est mauvaise et l'angle est compris entre 90 et 100°. A ce stade, il y a souvent un aplatissement du cotyle et/ou de l'arthrose.

- Notation E  : dysplasie sévère ou stade 3. Dans ce cas, il y a subluxation ou luxation et l'angle est inférieur à 90°. A ce stade, il y a généralement un aplatissement du cotyle, une déformation de la tête fémorale et de l'arthrose.

 

Traitement de la dysplasie de la hanche

1) Traitement médical

Il est basé sur l'administration d'antalgiques (anti-douleur) lors de crises où l'animal souffre particulièrement, et l'administration continue de protecteurs de cartilages articulaires. Il ne s'agit pas d'un traitement curatif mais symptômatique : on ne soigne pas la dysplasie mais on attenue les effets de cette dernière.

2) Traitement chirurgical

C'est le seul moyen de "guérir" un animal de sa dysplasie. Il existe plusieurs types d'intervention chirurgicale, adaptées à différents de cas de figure.

  • la Triple Ostéotomie du Bassin (TOB)

Il s'agit de casser puis resouder et réorienter le bassin de façon à rétablir une conformation anatomique normale de l'articulation de la hanche, c'est-à-dire que l'acétabulum vienne bien recouvrir la tête du fémur. Il y a une oséotomiede l'ilium, une de l'ischium et une du pubis....d'où le nom triple ostéotomie. Grâce à cette triple ostéotomie, on peut faire pivoter la cavité acétabulaire, puis on pose une plaque de façon à refixer le bassin, l'articulation se trouvant alors dans une meilleure conformation. La tête fémorale ne se luxe alors plus aussi facilement et l'articulation est plus stable.

Cette opération se destine aux animaux jeunes (généralement moins de 9 mois) et n'est possible que s'il n'y a pas encore d'arthrose.

  • La Réssection de le Tête et du Col du Fémur (RTCF)

Il s'agit de couper le fémur en dessous du col, pour retirer la tête et le col fémoral. Il n'y a alors plus d'articulation puisqu'on a retiré une des surfaces articulaires. Par conséquent, il n'y a plus aucun frottement des os entre eux non plus, ce qui fait disparaitre la douleur. L'articulation "détruite" est alors remplacée par les muscles qui jouent un rôle de soutien entre le bassin et le "reste" de fémur. C'est pourquoi il est très important que le chien possède une bonne masse musculaire !

Cette opération est destinée aux animaux un minimum musclé (d'où l'intérêt de ne pas attendre que l'animal soit totalement amyotrophié (= démusclé) ce qui arrive sur des animaux qui ont tellement mal qu'ils utilisent très peu leur membre), et pesant moins de 35-40 kg. Au-delà d'un poids de 35 kg, le pronostic est réservé car il est difficile pour les muscles seuls de supporter le poids de l'animal.

  • La Prothèse totale de hanche

Cette méthode, utilisée couramment en chirurgie humaine, est la seule solution chirurgicale chez les chiens de race géante (Saint-Bernard, Terre-Neuve...) ayant déjà de l'arthrose ou trop vieux pour recourrir à la TOB. L'articulation de la hanche est totalement remplacée par une articulation artificielle. Il s'agit d'une intervention très coûteuse et qu'un nombre restreints de praticiens sont aptes à réaliser.

  • La symphisiodèse de la symphyse pelvienne

Technique destinée aux chiens très jeunes, moins de 5 mois. Elle concerne donc des chiens très dysplasiques ayant des symptômes déjà évocateurs avant cet âge de 5 mois. Elle consiste à détruire le cartilage de croissance de la symphyse pelvienne et ainsi de stopper la croissance de la face ventrale du bassin, ce qui donne une ventroflexion du dit-bassin lorsque l'animal grandit. Cette ventroflexion permet alors un meilleure recouvrement des têtes fémorales dans l'actétabulum.

  • La Myectomie du muscle pectiné

Cette opération a uniquement un but antalgique chez les chiens de 6 mois à 1 an, en général avant le pose d'une prothèse de hanche. Il s'agit de la section du muscle pectiné qui se situe à la face interne de la cuisse et qui est souvent très tendu lors de dysplasie coxo-fémorale.

  • La dénervation de la hanche

Elle permet de supprimer la douleur par suppression de l'afflux nerveux arrivant vers la capsule.

 

Attention !!!! Petit détail qui a son importance : un chiot inscrit au LOF ne veut pas dire indemne de dysplasie coxo-fémorale. LOF ne veut pas dire non plus que les parents ont été radiographiés. LOF veut dire une seule chose : les deux parents ont été confirmés par un juge cynophile à l'occasion d'une exposition canine. Ce juge les a trouvés en accord avec le standard de la race, morphologiquement parlant. Mais cela ne signifie pas qu'ils ont de bonnes hanches car cela ne se voit pas toujours sur un simple examen de confirmation....Je dirais même que cela ne se voit quasiement jamais sauf si le chien est TRES TRES TRES DYSPLASIQUE et boite de manière évidente !!!!